Auguste ARMENGAUD
Automne
Quand septembre dore encore les croupes des collines
Là, dans la mousse joufflue naissent comme des fleurs
Sous l’épaisse vapeur des feuilles vipérines
Les girolles poivrées aux sauvages senteurs
Les lépiotes en guenilles au milieu des fougères
Amanites vineuses en crénelures légères
Ou coprins chevelus dans l’herbe rase des prés.
Alors les bousiers bourdonnant tels des hélicoptères
Creuseront des cavernes dans les pieds des grands bais
Sur l’allée ocracée que tendrement inondent
De leur suc cajoleur les bruyères en fleurs.
Quand octobre revêt sa cape cristalline
Aux matins harmonieux des gracieuses sylvines
Là, vers les noisetiers le long du chemin clair
Oubliés du groin laboureur des sangliers intrépides
Crèvent comme des bulles sous l’humide chaleur
Les petits cèpes ronds aux multiples couleurs.
Là, suer la litière de fibres échancrées, dort
Le tricholome équestre dans sa peau jaune d’or.
Alors les tiques s’accrocheront à la chair des curieux
Les frelons qui font peur frôleront les ramasseurs avides
Aux paniers bien trop lourds de bolets orgueilleux.
Quand novembre déshabille d’un coup les grands chênes
Et que noircit l’humus sous les sabots de bois
Quand les sources gèlent dans leurs goulots étroits
Les réseaux mycellaires se défont de leurs chaînes
Alors l’air pelucheux ne sentira plus la farine
Les écureuils frileux rentreront leurs corbeilles de noix
Les bogues éclatées se couvriront de bruine
Pour longtemps va souffler le vent du nord si froid
Qui balaiera sans cesse les restants de poussière
Alors les rejets fourchus craqueront sous les pas
Alors le soleil rouge prendra ses quartiers d’hiver.
Mario FERRISI
Gaïa
Lorsque les gonds rouillés s'effarent en gémissant
Laissant l'huis de l'enfer s'ouvrir au vent mauvais
Aux noirs oiseaux de nuit, aux flots tourbillonnants
Une amère fanfare emplit l'humanité
Quel est donc ce fracas que mille échos cadencent
Ces pleurs, ces cris grinçants, ces blasphèmes, ces clameurs
Ces cités qui s'enflamment, tous ces spectres qui dansent
L'inexorable flux, l'inhumaine rumeur ?
Quelles sont toutes ces voix étranges et inouïes
Qui claquent dans le vent comme un conflit d'armures
Toujours resurgissant, sans cesse évanouies
La mêlée qui foudroie le chant de la nature ?
Quel est donc ce néant qui flotte et qui oscille
Au-dessus du chaos bien plus noir que la nuit
Au-dessus des destins des hommes imbéciles
Au-dessus de la terre , de la femme avilie ?
Le discours des humains n'a plus d'apothéose
La foudre et la tempête couvrent toute étendue
L'Amazonie fauchée n'a plus rien de grandiose
L'univers est déchet, l'arctique aura fondu
Où sont donc ces accords, ces hymnes bienheureux
Ces musiques d'un monde aujourd'hui révolu
Les voix de tous ces hommes qui se parlaient entre eux
Un chant universel … à jamais disparu ?
Jean ESPARBIE
Vous et moi
A Mathis
« Pourquoi me regarder avec cette insistance
Me trouvez-vous méchant et surtout monstrueux ?
Recherchez-vous au fond si quelque ressemblance
Ravirait votre esprit pour le moins tortueux ?
Allez savoir comment le destin un jour triste
M’accabla d’un défaut remarquable à l’entour.
Il me fait désigner très justement autiste,
Alors n’ajoutez rien à ce terrible tour.
Rejetez-moi aussi car pris d’indifférence
Vous pensez importun mon passage au milieu
D’êtres presque parfaits selon la référence
Que vous donnez sans cœur sur la Terre en tout lieu.
Mais qui prodiguera par pitié ou largesse
Un peu d’attention afin d’appréhender
Dans l’âme le trésor, en un mot ma sagesse,
À exploiter enfin sans vous le demander ? »
Claude SUBREVILLE
Mon confinement
Je suis dans le confinement
J’habite seul et sans maman rue de Bretagne
je téléphone à mes amis une façon
de voir la vie sans la compagne
C’est pas mal de se reposer
Ne faut il pas un peu marcher
dans la cuisine
ranger, laver et essuyer
une seule assiette à l’évier
Ca me bassine
Le boulot me fait un peu peur
me salir les mains j’ai horreur
je me les gante
Mon vrai métier, petit rentier
quand on me parle de chantier,
ça m’épouvante
J’ai pas de numéro spécial
ainsi va la vie c’est normal
dans ma cabane
je n’ai pas d’animaux chez moi
j’entends les oiseaux sur le toit
qui se pavanent
J’ai appris à téléphoner
pour des SMS passer
avec la bise
j’ai un rythme qui est très « molo »
pour pouvoir tenir en solo
comme ils le disent ….
Guy PUJOL
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